Patrouille rurale

Patrouille rurale

dimanche 13 février 2011

Epié [De l’image et de son message]

Je réponds avec retard* à un commentaire posté sur un billet édité le 16 janvier dernier.
Ce commentaire était le suivant : « Je trouve regrettable que le directeur se serve de votre blog pour punir les élèves. Que certaines photos ou commentaires le fassent "grincer" je peux comprendre, mais vous parlez de liberté de parole, je trouve que là il ne la respecte pas ! Du coup, je pense que certains élèves n'osent plus être aussi libres qu'auparavant dans leur "mouvements" car tout semble être "épié" et cela favorise à mon sens les incompréhensions ou erreurs de comportement. Ce blog doit respecter également la liberté des élèves et rester un oeil indépendant sur leur travail. Ce qui n'a pas été le cas ces temps-çi. »
Il y a plusieurs notions abordées dans cette remarque, aussi je scinderai ma réponse en quatre paragraphes et autant de photos.

1-. A propos de « (que) le directeur se serve de votre blog pour punir les élèves ».
Le directeur de l’école n’a jamais eu besoin du blog pour savoir ce qui se passe en dehors de l’école ! L’école est connue et les élèves, de par leur tenue –militaire ou bleue– sont facilement identifiables. Dans le cas de la photo ci-dessous, ce n’est pas ma photo qui a entraîné une réprimande à l’élève (car le directeur n’a jamais vu cette photo) mais un agriculteur sur les terres duquel cette élève chevauchait. :-(
Il est en effet, dans le cadre des patrouilles strictement interdit de galoper. C’est un impératif de sécurité. En cas de chute, l’élève peut être grièvement blessée. Le cheval aussi. Sans oublier que si le cheval perd son cavalier à moins de 3 ou 4 kilomètres de l’école, c’est potentiellement le retour assuré de l’équidé vers son box, par instinct, sans que quiconque ne puisse le retenir. Et un cheval au galop sur plusieurs kilomètres, c’est potentiellement un grand nombre d’incidents (ou accidents) possibles, choses qui relèvent de la responsabilité de l’école. Ce sont ces raisons qui dictent cette interdiction de galoper. Un bon cavalier doit savoir maîtriser sa monture en toutes circonstances !




2-. A propos de « je pense que certains élèves n'osent plus être aussi libres qu'auparavant dans leur "mouvements" car tout semble être "épié" ».
En intégrant cette école, les élèves savent qu’ils suivent une formation professionnelle (ce dernier mot me semble capital) destinée à leur inculquer les données nécessaires à pouvoir exercer demain dans la profession de garde équestre. Ils signent le premier jour un règlement intérieur dans lequel sont stipulés leurs droits et devoirs.
Différentes interdictions leur sont notifiées. Telle que l’interdiction de manger en salle de classe, de fumer dans le pailler, dans les écuries ou dans les cours, de téléphoner ou textoter durant les cours ou à cheval. Les élèves sont "libres" d’obéir mais aussi "libres" de désobéir. Dans ce dernier cas, ils acceptent implicitement, en désobéissant, d’en recevoir les sanctions afférentes.
Ma présence avec un appareil photo ne change pas grand-chose. Je dirai même : cela ne change strictement rien. Je le constate avec la p18 comme je l’ai constaté il y a deux ans avec la p14. Des élèves téléphonent à cheval, mangent en salle de classe, s’échangent des SMS en cours … Que je sois là ne change rien : je ne pense pas qu’il y ait un seul élève qui se sente épié !
Témoin la photo ci-dessous prise durant un cours de sport. Il est interdit de fumer durant le cours de sport, sauf durant une éventuelle pause. A l’instant de cette photo, les élèves ne sont pas en pause. Pourtant l’élève de gauche fume. Si l’on s’attache uniquement à la photo, cette élève est fautive. Pourtant elle ne l’est pas. Enfin pas complètement.
En effet, elle ne participe pas au cours de sport (quoique habillée en tenue de sport) mais elle a été punie et elle est de curage de boxes. Elle s’est octroyée elle-même une pause, pause durant laquelle elle peut fumer. C’est durant sa pause de curage qu’elle est venue discuter au cours de sport. La responsable du sport lui a demandé de ne pas fumer. L’élève n’a pas obtempéré parce que n’étant pas en sport. J’ai continué mes photos des élèves qui sautaient, elle a continué à fumer. Je ne me suis pas caché pour photographier, elle non plus pour fumer.




Comme j’ai expliqué dans le premier point, le directeur n’a pas non plus eu besoin de la photo ci-dessus pour être informé de la situation : il lui a suffit d’entendre les élèves discuter sous le préau. En début d’année, le directeur annonce aux élèves : « Attention, je vois tout, j’entends tout ! ». Force m’est de constater que cette phrase n’est pas loin de la vérité et que mes photos ne changent strictement rien à la connaissance du comportement des élèves.
D’ailleurs, le directeur, ayant au cours de sa carrière travaillé au sein du SIRPA, le Service d’Information et de Relations Publiques des Armées, se méfie comme de la peste des photos et des photographes. Et il a un peu raison. On fait dire ce que l’on veut à une image, témoin la photo ci-après :




Si l’on regarde cette image, les trois élèves en patrouille urbaine traversent au feu rouge. Une amende à 4,00€ d’après la législation en vigueur sur le Code de la Route. Ce qui est du plus mauvais goût pour des élèves gardes !
Il n’y a pourtant aucune faute de la part des élèves. L’automobiliste est bien arrêté au feu rouge. Les élèves ont entamé la traversée au feu vert, feu vert qui est devenu rouge au milieu de leur traversée. Sanctionner ou réprimander sur ce cliché serait donc erroné.

3-. A propos de « Ce blog doit respecter également la liberté des élèves ».
Mais il la respecte ! En début d’année, j’ai demandé aux élèves ce qu’ils ne voulaient pas que je photographie les concernant. J’ai obtenu deux ou trois réponses, du genre « Je ne souhaite pas être photographiée quand je fume parce que ma famille ne sait pas que je fume et je ne veux pas que cela se sache ». J’ai entendu cette demande, je la prends en compte dans mon travail et je m’attache à scrupuleusement la respecter.
Je ne pense pas un seul instant que mes photos volent la moindre parcelle de liberté aux élèves, je ne pense pas un seul instant que ce blog volent une quelconque parcelle de liberté aux élèves. Je les laisse libres d’agir, sauf quand manifestement ils vont commettre une erreur qui puisse leur être trop néfaste, auquel cas je me manifeste tel un camarade, un ami, un grand frère en disant « Attention à ceci ou à cela ! ».

4-. A propos de « vous parlez de liberté de parole, je trouve que là il (le directeur) ne la respecte pas ».
Comme je l’ai indiqué hier dans mon billet dénommé "Etats d’âme", ce blog relève de mon initiative, de ma responsabilité. Personne ne s’est jamais permis d’interférer dans mon choix de photo, dans le contenu de mes écrits. Personne et surtout pas le directeur qui m’a laissé totalement libre du choix de mes sujets.
Pour être honnête et précis, je n’ai eu que trois remarques en 249 billets. La première en septembre, émanant d’une élève qui m’a demandé de remplacer une photo sur laquelle elle se jugeait à son désavantage. J’avais indiqué en début d’année aux élèves de m’indiquer si une photo leur déplaisait et que s’ils argumentaient, je tiendrai compte de leur remarque. J’ai donc changé la photo relative à cette élève.
La seconde remarque, toujours en septembre, émanait de la directrice de l’école. Elle m’a demandé d’ôter une photo qui comportait un détail. J’ai jugé l’argumentation recevable. Je n’ai pas ôté la photo mais … le détail dans la photo. :-)
Enfin, la troisième remarque émanait du directeur et elle était relative à un billet en décembre dans lequel j’avais peut-être un peu trop réagi avec véhémence. J’ai retenu les arguments avancés et j’ai supprimé le billet qui avait cependant eu le temps d’être lu par quelques élèves. En discutant avec ces élèves, ils ont eux aussi retenu les éléments avancés par leur directeur.
En résumé, sur 249 billets, j’ai donc eu trois –et uniquement trois– demandes correctives. Demandes argumentées pour lesquelles je n’ai subi aucune pression. Je reconnais que c’est exceptionnellement peu car si je prends le groupe de presse pour lequel j’ai travaillé de 2004 à 2008 et pour lequel j’ai dû écrire environ 250 reportages, je pense que j’ai dû avoir près de 50 demandes correctives (pour des intérêts financiers, politiques, commerciaux, etc.).
En conclusion, ma liberté de parole est donc totale.

Et puisqu’il est dans ce billet question d’image, d’information dans l’image et d’image pouvant entraîner une sanction, voici une photo où ce ne sont pas les élèves qui sont responsables de quelque chose, mais bien ce conducteur de tracteur qui est venu durant plus de 80 mètres terroriser les chevaux en collant son engin à 5 mètres à peine des postérieurs des chevaux, les plaçant dans un état d’excitation important, à tel point que j’ai vu le moment où il allait, avec son tracteur, pousser les chevaux qui n’avançaient pas assez vite à son goût !



* Nota : J’ai pris beaucoup de temps pour répondre à cette remarque car je souhaitais prendre plusieurs photos pour illustrer ma réponse. L’écriture est un exercice qui peut prendre de longues heures, pour quelques dérisoires secondes de lecture. Et avec plus de 12.000 photos de la p18, en rechercher une particulièrement exige parfois beaucoup de temps.

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