Patrouille rurale

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samedi 12 février 2011

Etats d'âme ?

Sur le billet du lundi 31 janvier (ici) un internaute anonyme* a écrit : « Ce blog n'est-il pas fait pour décrire la vie à l'école et non vos états d'âme ? »
Depuis le début de l’année, quelques personnes m’ont parlé de ces "états d’âme". Avec une vue négative, de la part de la direction de l'école. Avec une vue positive, de la part de parents d’élèves qui m’ont dit que mes réflexions leur semblaient intéressantes pour mieux comprendre l’enseignement suivi par leur fille.
Je vais donc répondre à cette question anonyme.
D’abord par une définition. Parce que je pense que c’est utile que nous parlions de la même chose.
Qu’est ce que l’âme ? "La cause qui anime les êtres" (Grand Robert de la Langue Française, page 427, col.1), du latin anima, qui signifie "souffle"
Que sont les états d’âme ? "Les sentiments que l’on éprouve, les impressions que l’on ressent" (id. page 429, col.2)

Ensuite par une répétition. Parce que j'ai parfois l'impression qu'il n'y pas que les élèves où "ça rentre par une oreille et ça sort par l'autre" mais qu'il y a aussi des internautes pour lesquels "ça lit par un oeil et ça oublie par l'autre" ...

Le 21 août 2010, j'ai créé ce blog. C'est une décision strictement personnelle. Quatre motivations m’animaient :
1-. C’était partager avec les élèves chaque jour au moins une photo parce que j’avais retenu l’impatience des élèves de la p14 qui restaient plusieurs jours sans rien voir de mon travail ;
2-. C’était pour moi l’obligation d’aller au bout de mon engagement, parce que vivre sept mois sans prendre un seul jour de repos, c’est difficile, donc je comptais sur mes lecteurs (ou l’attente de mes lecteurs) pour me pousser à me dépasser, notamment dépasser ma fatigue ;
3-. C’était pour moi l’occasion d’échanger avec des collègues auteurs, journalistes, photographes sur mon travail, notamment les conséquences et soucis liés au travail en immersion totale, sujet sur lequel je prépare un ouvrage avec un collègue ;
4-. Je suis photographe. Ce blog, c’était l’occasion de montrer mon travail. Je suis auteur. Ce blog, c’était l’occasion de parler de ce que je pouvais réaliser.
Aucune de ces quatre raisons ne mentionne l’école. Mais comme je vis, je photographie et je vais réaliser un ouvrage qui en parle, l’école est implicitement le contenu de ce blog.

Le 21 août, j'écrivais alors : « A raison d'une photo par jour, ce blog va donc raconter ma vie à l'école, les péripéties d'un reportage de sept mois en immersion et le chemin qui conduira à la parution de "Une école, un cheval, un métier" à l'automne 2011. » Il est aussi inscrit dans le bandeau d'accueil de ce blog : « ce blog retrace ma vie avec la promotion 18 ».
Il n'est pas du tout écrit que ce blog est destiné à raconter la vie à l'école !
Je suis d'ailleurs totalement indépendant de l'école, tant financièrement qu'intellectuellement. J'obéis cependant à tous les règlements de cette école et je me plie à toutes ses règles, que cela me plaise ou non. Mais si je devais tenir un blog qui raconte la vie de l'école, il me semble que je deviendrais alors un chargé de communication et qu'à ce titre, la direction de l'école ait un droit de regard total et un devoir de correction sur le contenu d'un tel blog. Et que j’en retire bien sûr quelques subsides ...

"Ma vie", ces deux mots me paraissent clairs. Ma vie, ce sont mes coups de coeur, mes coups de gueule, mes envies, mes dégoûts. Ce qui m’anime.
"Les péripéties d’un reportage", ce sont les aléas d’une vie en immersion dans un sujet. Je suis humain, je suis perfectible. Mes échanges avec tel ou tel professeur, mes différences de point de vue avec tel ou tel membre de la direction, mes attirances avec tel ou tel élève, tout cela, ça fait partie des "péripéties".
Quand le 13 janvier, je fais remarquer aux élèves qu’ils manquent d’engagement et que j’en parle ici, est-ce un "état d’âme" ? Oui, parce que c’est mon cœur qui m’a fait réagir et oui, c’est aussi une "péripétie" de la vie de cette promotion parce que depuis des élèves m’en tiennent rigueur. Je crois que les deux sont intimement liés.

Le 22 août, pour mon troisième billet, j’écrivais : « Je me suis assis sur un tas de sacs d’aliments pour chevaux et j’ai attendu. Je ne veux pas que mes photos de l’automne 2010 soient une pâle copie de celles de l’automne 2008. Aussi ai-je voulu sentir les murs, les pierres et les bois, les écuries désertées et les salles de classe silencieuses pour en saisir une nouvelle émotion. » N’était-ce pas déjà un état d’âme ?
Le 25 août, je parle des états d’âmes des élèves et je rajoute le mien.
Pourquoi donc cette question aujourd’hui ?
Dans une vie de plus en plus numérique, de plus en plus formatée, de plus en plus brutale, voire de plus en plus totalitaire, je défends une version humaniste de la société. Les états d’âme et leur échange font pour moi partie de cet humanisme.

Alors, je vais reprendre une formule du directeur ... :-)
A la question : « Ce blog n'est-il pas fait pour décrire la vie à l'école et non vos états d'âme ? », ma réponse sera :
– Refusé !
– ... ?
– Oui, j’ai dit : REFUSÉ !


Une petite photo de bonne humeur prise lors de l’exercice topographique en extérieur le 10 février




* Je profite aussi de cette explication pour parler des internautes qui viennent poster un commentaire. A l’origine, l’ajout de commentaires était réservé à des gens dûment inscrits. Plusieurs personnes m’ont dit que c’était "compliqué", "contraignant" et j’ai donc, à contre cœur, levé cette barrière. Aujourd’hui n’importe qui peut venir écrire. Sans que l’on sache qui se cache derrière quoi. Ce que je déplore.
Je viens de répondre à quelqu’un, sans savoir s’il s’agit d’un parent d’élève, d’un élève, ancien ou actuel, d’un professeur ou d’un lecteur qui n’a aucun lien avec l’école. Il est évident que je n’aurai pas exactement la même réponse si je savais à qui je m’adressais.
Pourquoi d’ailleurs rester "anonyme" ? Je ne comprends pas cette position. Il y a une forme de lâcheté tant morale qu’intellectuelle qui me gêne.
Et je ne suis visiblement pas le seul, à l’image de cette mère d’élève qui m’a écrit par e-mail en début de semaine:
« En ce qui me concerne, je respecte votre choix et je ne me permettrai jamais de vous juger en quoique se soit (contrairement à certains parents anonymes) pour la seule raison que je ne suis pas présente comme vous au cœur de l'action ! »
En bref, tant qu’à donner son avis, je préfère savoir qui je lis et à qui je réponds ;-)
J’adore la contradiction –et je la défends–, parce qu’elle est riche de progression intellectuelle et d’exigence de réflexion, mais débattre avec un inconnu, ça n’est pas trop mon truc.

2 commentaires:

  1. Ok Désolé pour le commentaire

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  2. C'est dommage, j'aurai voulu que vous argumentiez, ...
    En quoi ces "états d'âme" pouvaient être négatifs ?
    Et même en quoi, il manque dans ce blog une information sur la vie des élèves à l'école ?

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